Chaïm Soutine
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Peintre d'origine Biélorusse, Chaïm Soutine (1894-1943), est l’un des représentants de l’École de Paris. Issu d'une famille de onze enfants dont il est l'avant-dernier, modeste et très religieuse. Il grandit à Smilovitchi, un shtetl de Biélorussie, situé à une vingtaine de kilomètres de Minsk, principalement peuplé de juifs très religieux. Son père Salomon est tailleur.
En 1907, âgé de 13 ans, il réalise en cachette le portrait du rabbin du shtetl, ainsi transgressant l'interdit de la représentation du visage humain. Soutine roué de coups par le fils du rabbin, bouché de son état, passe deux semaines à l'hôpital. Sa famille obtient de la justice une compensation, de vingt-cinq roubles ce qui lui permet de quitter Smilovitchi.
Cette même année, il suit des cours de dessin à Minsk. Et se lie d’amitié avec Michel Kikoïne.
En 1910, il s'inscrit à l'Ecole des Beaux-Arts de Vilnius où il rencontre Pinchus Krémegne. Tous les trois, devenus inséparables, étouffent à Vilnius. Ils rêvent de la capitale française, comme d'une " ville fraternelle, généreuse, qui sut offrir la liberté [aux] peuples venus d'ailleurs ", moins menacée que la Russie par l'antisémitisme, et en constante ébullition artistique. Krémègne, un peu moins pauvre, part le premier, suivi par Soutine et Kikoïne, qui croit se souvenir qu'ils ont débarqué à Paris le 14 juillet 1912 et que leur premier soin fut d'aller entendre Aïda à l'Opéra Garnier. Chaïm Soutine a définitivement tourné le dos à son passé, dont il n'emporte rien, pas même des bagages, pas même ses travaux.
En 1913, Soutine et ses deux amis s’installent à La Ruche et fréquentent l'atelier de Fernand Cormon. Il va connaitre dix ans de misère et travaille comme ouvrier au Grand Palais et comme manœuvre chez Renault.
En 1914, au déclenchement de la guerre, il essaye de s'engager dans l'armée mais son état de santé l'en empêche malgré son désir. Il passe quelque temps au nord-ouest de Paris chez son ami Kikoïne où il peint des paysages. Puis de retour à Paris, il s'installe chez le sculpteur Oscar Miestchaninoff à la Cité Falguière.
En 1915, grâce à Lipchitz, il fait la connaissance de Modigliani. De cette rencontre nait une grande amitié les rendant inséparables. L’année suivante, Modigliani l'emmène pour la première fois chez son marchand Léopold Zborowski au 3 rue Joseph Bara qui devient son marchand d’art. C'est l'époque où Soutine peint des natures mortes misérabilistes. Zborowski lui finance des voyages dans le Midi (Cagnes-sur-Mer, Céret et Vence). C'est à Cagnes-sur-Mer qu’en 1920, il apprend le décès de son ami Modigliani et le suicide de sa campagne Jeanne Hébuterne. Soutine se sent maintenant abandonné, plus seul que jamais et sa santé se fragilise. Il revient à Paris à la demande de son marchant d’art. Il trouve une alliée précieuse en la personne de Paulette Jourdain, assistante de Zborowski, ex-modèle de Modigliani, modèle et confidente de Soutine.
Dans la galerie de Paul Guillaume, le collectionneur américain Albert Coombs Barnes remarque le petit Patissier, l'achète aussitôt et demande à voir d'autres œuvres de Soutine. Alors Paul Guillaume l’amène chez Zborowski, qui lui montre les dernières toiles de l’artiste. Ce sont ces hallucinants paysages qui séduiront Albert Coombs Barnes dont les achats, relatés par Paul Guillaume dans Les Arts à Paris, assureront les premiers succès de Soutine. Et en décembre 1922, Barnes en achète une grande partie pour la somme de 3000 Dollars.
Du jour au lendemain, Soutine accède à la gloire. Il devient dans le milieu de l’art un peintre « connu, recherché des amateurs, celui dont on ne sourit plus ». Il rompt avec ses anciens compagnons d’infortunes pour oublier ces années d’épreuve où parce que ces derniers jalousent son succès. Zborowski lui offre un salaire de 25 francs par jour, il a une voiture avec chauffeur à sa disposition. Ses œuvres sont recherchées, les prix montent. Ses tableaux passent de 400 francs pièce à 2000 ou 3000 francs. Pour la première fois de sa vie, il a de l'argent et se transforme en dandy passant devant le Dôme et la Rotonde et faisant semblant de ne reconnaitre personne.
En 1924, il rencontre la musicienne Deborah Melnik, avec qui il a une liaison de courte durée. De cette rencontre naît leur fille Aimée le 10 juin 1925. A cette époque, le couple est déjà séparé. Le peintre non seulement n'aurait pas reconnu l'enfant ni subvenu à ses besoins, mais aurait suggéré par ses calomnies qu'elle n'était pas de lui.
En 1926 et 1927 Soutine séjourne et peint dans le Berry au Blanc où Zborowski possède une vaste maison pour que ses artistes puissent se reposer et y travailler. L’artiste entame la série des enfants de chœur.
En juin 1927, à la galerie Bing, à Paris a lieu sa première exposition personnelle. Soutine se fache avec Zborowski pour des raisons d'argent. Il a des problèmes financiers et s'installe à l'hôtel. Il n’arrive plus à travailler à cause de ses maux. A cette même époque, il devient le protégé de Madeleine et Marcelin Castaing, qui vont lui donner les moyens de peindre. Malgré cela, il n’arrive pas à surmonter ses angoisses. Il détruit ses toiles ou bien sinon il repeint par-dessus.
Entre 1931 à 1935, il passe une partie de l'été à Lèves près de Chartres dans la propriété des Castaing où il rencontre Blaise Cendrars, Jean Cocteau, Drieu la Rochelle, Elie Faure, Erik Satie, Maurice Sachs. A cette époque, il s’y découvre un intérêt nouveau pour les animaux sans pour autant délaisser les natures mortes, les paysages ou les portraits.
Après la mort de Zborowski, en 1932, les Castaing demeurent sa principale source de revenu.
En 1937, il rencontre au Dôme une jeune juive allemande ayant fui le nazisme, Gerda Michaelis Groth. Il la baptise "Mademoiselle Garde" parce qu’elle vieille sur lui toute une nuit, alors qu'il souffre toujours de ses maux d'estomac. Au matin il refuse de la laisser partir : " Gerda, tu as été cette nuit ma garde, tu es Garde, et maintenant c'est moi qui te garde. "
Il passe l'été 1939 avec Gerda dans un village l’Yonne, Civry-sur-Serein. Là, Soutine peint plusieurs toiles ayant pour motif cette route plantée de grands peupliers dont le tableau la route qui conduit à l'Isle-sur-Serein. A ses côtés, le peintre connait des moments de douceur et d’équilibre.
Début septembre 1939, la guerre est déclarée. Soutine veut rentrer à Paris mais le maire de Civry, Monsieur Sebillotte lui fait savoir qu'il est assigné à résidence ainsi que sa compagne Gerda avec interdiction de sortir de Civry. Il est juif et Gerda juive allemande. Elle sera déportée au camp de Gurs dans les Pyrénées-Atlantiques. Grâce à l'intervention de l'écrivain Joë Bousquet et du peintre Raoul Ubac, elle sera libérée mais Soutine et Gerda ne se reverront plus. Elle rentre à Paris et Madeleine Castaing lui apprend que Soutine vit avec Marie-Berthe Aurenche, ancienne épouse de Max Ernst.
En 1941, commence ses années d’errance. Il se réfugie à Champigny-sur-Veude, près de Chinon avec Marie-Berthe. C'est là qu'il passe les deux dernières années de sa vie, en y peignant une trentaine de toiles, dont le portrait de Marie-Berthe qu'elle arrange en son absence de quelques coups de pinceau. C'est pourquoi il le détruit à coup de couteau. Il confie ses toiles à Madame Fernand Moulin, qui les emporte roulées à Paris et les vend à la galerie Louis Carré. Début août, une crise plus violente que les autres le conduit à l’hôpital de Chinon. Il faut l'opérer d'urgence, mais Marie-Berthe le fait conduire en ambulance à Paris, avec un détour par la Touraine et la Normandie afin d’éviter les barrages de la police française mais aussi pour récupérer des toiles en divers endroits. Ce voyage en ambulance est un véritable martyre pour Soutine qui arrive à Paris et le 7 août se fait opérer mais il est déjà trop tard.
Soutine de son vrai nom Chaïm Solomonovitch Soutine meurt le 9 août 1943 à Paris à l'âge de 50 ans.
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1893 - 1943
Reportage sur Chaim Soutine disponible ici
